Du 17 au 23 avril 2017, Fert a mobilisé Gérard Sidot, ancien directeur du BTPL, pour une première mission en Géorgie. Il revient pour nous sur son parcours et sur cette première mission auprès d’éleveurs laitiers du petit Caucase.

Pouvez-vous vous présenter rapidement ?

J’ai travaillé pendant 40 ans dans la filière laitière française, au sein du BTPL et au service des coopératives et des agriculteurs membres de celles-ci. J’ai d’abord commencé en tant qu’ingénieur conseil pendant plus de 25 ans, ce qui m’a permis de bien connaître le terrain. Puis, en 1995, j’ai accédé au poste de directeur, où j’ai alors eu la responsabilité d’animer une équipe de 20 ingénieurs. Pendant toutes ces années, j’ai aussi conduit un certain nombre de missions à l’étranger, en particulier, pour l’accompagnement de la filière laitière en Tunisie. Depuis 4 ans, je suis retraité… mais toujours passionné par l’agriculture, et l’élevage en particulier.

Vous êtes allé récemment en Géorgie, qu’avez-vous fait là-bas ?

Fert m’a contacté pour participer à une mission de 6 jours au mois d’avril, dans la région du Samtskhe Javakheti, Sud Caucase, en accompagnement de leur partenaire géorgien, le GBDC. Nous avons donc conduit cette mission conjointement, avec une bonne complémentarité de compétences entre la chargée de projet Fert et moi.

L’objectif était double : il s’agissait d’apporter mon expertise dans la connaissance de la filière laitière pour aider Fert à faire un bilan après 6 ans d’actions menées dans le petit Caucase. Mais il s’agissait également de contribuer à établir les bases d’une prolongation du projet à partir de 2018.

Pour cela, de nombreux contacts ont été organisés par le GBDC, qui nous a accompagnés tout au long de la semaine : visites auprès de producteurs, rencontres avec des transformateurs (éleveurs ou laiteries) et d’autres acteurs : fournisseurs, services sanitaires de l’Etat…

Qu’avez-vous découvert lors de cette mission ? Qu’est-ce qui vous a surpris ?

Etonnamment, j’ai découvert en Géorgie un environnement assez similaire de ce que j’avais pu voir lors de mes précédents voyages en Russie ; les conditions ne m’ont pas totalement surpris. Concernant les actions conduites par le GBDC, là aussi, j’ai trouvé de nombreux points communs avec l’expérience que le BTPL a coordonnée en Tunisie. Ainsi, si j’avais à retenir trois points, je citerais :

  • Les problèmes d’alimentation – pourtant cruciale dans les petites et moyennes exploitations où les conditions pédoclimatiques sont relativement difficiles. L’alimentation du troupeau constitue la base d’une production laitière de qualité et en quantité, et les éleveurs ne sont pas suffisamment conscients de cela (certains ne pensent qu’à agrandir leur troupeau, alors que la production par vache atteint difficilement 6 l/ jour) ;
  • Les questions de qualité du lait : aujourd’hui, il n’y a pas de paiement à la qualité du lait, ce qui n’est pas incitatif pour les éleveurs. De plus, les contrôles qualité de la part de l’État sont insuffisants : des lois ont été établies, mais il ne semble pas y avoir un système de contrôle très rigoureux dans les élevages et laiteries. Or, comme j’aime à le dire, la confiance n’exclut pas le contrôle … au contraire, le contrôle est un facteur de progrès !
  • La nécessité de construire une démarche filière avec les différents acteurs ; et en particulier, avec des groupements d’agriculteurs pour que les petits et moyens agriculteurs prennent leurs affaires en main ! Mais cela nécessite au préalable que les besoins fondamentaux des producteurs soient réglés, à savoir produire et vivre de leur production.

D’après vous, quelles sont les principaux challenges à relever dans les prochaines années pour le GBDC et Fert qui accompagnent ces éleveurs laitiers de la région Samtskhe Javakheti ?

Au-delà des trois points que je viens de mentionner, j’ai identifié plusieurs défis :

  • Pour le GBDC, il s’agit de renforcer sa culture du chiffre, en mettant en place des outils simples d’évaluation, pour être plus professionnel. Si le GBDC veut convaincre ses partenaires actuels ou futurs et pérenniser son activité auprès d’un plus grand nombre d’éleveurs, il doit pouvoir démontrer ses compétences et son efficacité. Des tableaux de bord simples peuvent être proposés à certains éleveurs pour mesurer les évolutions de leurs productions et pour convaincre d’autres éleveurs.
  • Pour Fert, les réflexions actuelles portent sur les modalités d’accompagnement du GBDC : comment avoir une relation plus étroite avec l’équipe GBDC, même à distance ? Il faut construire avec eux un système de suivi et de reporting simples et avoir des échanges réguliers au-delà des missions de suivi.